Quel recyclage pour les batteries des véhicules électriques ?
Si les véhicules électriques sont propres, les matériaux qui composent leurs batteries ne le sont pas vraiment.
En effet, les batteries lithium des voitures électriques contiennent des matériaux polluants, ce qui implique de se soucier de leur recyclage.
Que faire des anciennes batteries de voitures électriques ?
© Renault / Ecosources
Obligatoire depuis 2006 dans l'Union européenne, le recyclage des batteries des véhicules électriques est un enjeu pour les constructeurs comme pour les acteurs de la filière de valorisation des déchets.
Suez et Engie se sont penchés sur la question. Les deux géants de l’énergie ont lancé en 2017 une étude aux Pays-Bas pour étudier la possibilité de donner une seconde vie aux batteries usagées. Le marché hollandais compte actuellement près de 90 000 véhicules hybrides ou électriques, et autant de batteries qui peuvent être réutilisées.
A l’heure actuelle, les perspectives de valorisation des batteries usagées ne sont pas clairement définies. D'une part, le stockage statique est considéré comme une perspective de réemploi des batteries. D'autre part, le secteur du recyclage est à la recherche d'innovations. Rappelons que la valorisation des déchets est une filière en croissance, pourvoyeuse d’emplois durables.
Une seconde vie pour les batteries : Reconditionner avant de recycler
Bien qu'elles ne soient plus assez performantes pour faire fonctionner correctement un véhicule électrique (VE), les batteries usagées sont toujours assez puissantes pour d'autres usages. Pour les batteries au lithium, le potentiel de réutilisation est très important puisque même lorsqu’une batterie ne peut plus assurer la puissance demandée par la voiture, sa capacité énergétique résiduelle est de l’ordre de 80 % de la capacité initiale.
En juin 2017, le constructeur Renault et la société britannique Powervault, fabricant de solutions de stockage d’énergie solaire, ont conclu un partenariat pour mettre en place un projet de réutilisation de batteries usagées dans le système de récupération électrique pour le stockage de l'électricité. Selon Renault, le reconditionnement de ces batteries via Powervault permet de prolonger leur durée d’utilisation de 5 à 10 ans. Il s’agit donc d’une seconde vie pour ces batteries.
Le frein à ces idées, c'est le prix d'une batterie neuve : remplacer la batterie de son VE n'est à l'heure actuelle pas accessible à tous les budgets.
des batteries usagées toujours aptes à stocker de l'électricité
Pour sa voiture électrique Leaf, Nissan a signé un partenariat avec la société américaine Green Charge Networks. Cette dernière récupère les batteries usagées des Nissan Leaf pour en faire des systèmes de stockage d'électricité stationnaires.
On peut imaginer également un reconditionnement domestique des batteries. Les batteries usagées des consommateurs pourraient être réemployées comme batteries de secours en cas de panne électrique du foyer. Ou encore comme moyen de stocker l'électricité pendant la nuit, moment où le tarif du kWh est moins élevé. Cette pratique existe déjà au Japon.
C'est également au Japon qu'une ferme solaire utilisant des batteries reconditionnées de VE pour le stockage de l'électricité a vu le jour en 2014. L'Allemagne utilise déjà près de 20 000 batteries usagées pour des installations photovoltaïques.
Le reconditionnement de ces batteries s'inscrit donc dans le développement des technologies smart grids (réseaux électriques intelligents). Ainsi, la ville d'Issy-les-Moulineaux utilise des batteries usagées de véhicules électriques Renault pour stocker de l'électricité produite par ses panneaux solaires, afin d'utiliser cette énergie de manière différée.
Recharger la batterie de son véhicule avec une batterie de VE reconditionnée
Renault a eu l'idée de réutiliser les batteries de VE usagées dans la recharge de voitures électriques : la boucle est bouclée.
Baptisé E-Stor, le projet du constructeur français - en partenariat avec l'entreprise britannique Connected Energy - permet de stocker de l'énergie renouvelable - d'origine solaire ou éolienne - dans des batteries de VE usagées, afin de recharger ultérieurement les voitures électriques de particuliers.
Comment recycler les batteries des VE ?
Le recyclage des batteries des VE intervient quand leur capacité de stockage est trop faible pour permettre un reconditionnement - en moyenne 15 ans après leur fabrication.
Les batteries lithium contiennent des métaux lourds, encore très difficiles à recycler. Deux filières de recyclage sont concernées : le lithium et le nickel. Des chercheurs travaillent actuellement sur des types de batteries ne contenant pas de lithium, matériau rare et polluant. En 2016, le CRNS a annoncé la possibilité de batteries au sodium-ion, d'autres instituts de recherche travaillent sur l'utilisation du magnésium - minerai très abondant.
Selon une Directive européenne, la filière recyclage doit s'assurer de recycler au moins 50% des composants des batteries de VE. Le procédé actuel ne permet pas de recycler convenablement le lithium, ce qui représente un réel problème : c'est un minerai rare, pour l'instant indispensable dans la fabrication de batteries de type lithium-ion. Toutefois, selon la SNAM (Société Nouvelle d'Affinage des Métaux), acteur européen pour la collecte et le recyclage de batteries, jusqu'à 80% des composants peuvent être recyclés.
Les batteries sont désassemblées, puis les différents matériaux sont séparés par électrolyse puis récupérés et valorisés par des entreprises spécialisées.
le réemploi des métaux des batteries recyclées
Veolia cherche à atteindre un cercle vertueux via le recyclage des batteries. En effet, les différents matériaux - cuivre, aluminium, cobalt, nickel, manganèse, lithium - peuvent être réemployés dans la métallurgie pour créer des alliages ou de l'acier, ou dans l'industrie chimique pour servir à la fabrication de verrerie, batteries et encres.
Enfin, le lithium extrait des batteries usagées peut être purifié, et idéalement réemployé dans l'industrie automobile, permettant le caractère durable de la filière. Une batterie de véhicule électrique contenant près de 5 kg de lithium, le recyclage de ce minerai contribue à la fabrication de nouvelles batteries.
Le procédé de recyclage repose sur la déconstruction et le broyage des composants des batteries, puis le traitement à froid par hydrométallurgie des résidus pour en extraire les métaux réutilisables.
Des partenariats de recyclage entre constructeurs auto et industriels
Les constructeurs automobiles établissent des partenariats avec des fabricants de batteries et les industries du recyclage pour développer le marché de la seconde vie et du recyclage des batteries des VE. Ainsi, dans le cadre de son partenariat avec le constructeur Renault, la société française Euro Dieuze industrie - filiale de Veolia - se charge du recyclage des batteries. Le groupe automobile français PSA s'est associé à la SNAM pour valoriser ses batteries de VE usagées.
Depuis 2010, Tesla a mis en place un partenariat avec Umicore, une industrie de sidérurgie belge. Le processus de recyclage est rentable économiquement : d'une part l'oxyde de cobalt lithium extrait peut être réutilisé dans la fabrication de nouvelles batteries, d'autre part le lithium pourra être réemployé dans la production de ciment. Le recyclage des batteries contribue donc à différents types d'industries.
Un potentiel à exploiter
Selon l'Avere-France, près de 100 000 tonnes de batteries de VE sont utilisées en Europe. Étant donné qu'au moins 50% doivent être recyclées (directive 2006/66/CE), cela représente pas moins de 50 000 tonnes de batteries qui pourront être soit utilisées comme système de stockage stationnaire, soit traitées par des entreprises actrices de la filière recyclage. Et avec la croissance des achats de véhicules électriques, ce chiffre est amené à croître dans les années à venir.
Les véhicules électriques peuvent donc être considérés comme "propres" à condition que leurs procédés de fabrication et leur cycle de vie prennent en compte les enjeux du développement durable, qui inclue le recyclage des batteries.